Transversalité : culture de travail ou état d’esprit ?

On parle partout de transversalité. Dans les entreprises, les associations, les établissements publics : c’est devenu le mot magique pour casser les silos, fluidifier la communication, et améliorer la coopération (d’autant plus lorsque la structure résulte de fusions avec d’autres entités).

Mais à force d’en parler, ne passe-t-on pas à côté d’autre chose ? Car la transversalité ne s’impose pas par un organigramme ou une charte : elle se vit, ou plutôt, elle se choisit.

Mais, c’est quoi la transversalité ?

La transversalité désigne la capacité d’une organisation à faire travailler ensemble des équipes issues de métiers, de services ou de cultures différentes, pour « avancer ensemble », résoudre un problème commun, rationaliser les moyens ou atteindre un objectif partagé.

La transversalité s’oppose à la logique de silo, encore très présente dans certaines structures.

En 4 points que nous rencontrons à chaque fois, les (belles) promesses de transversalité peuvent être :

  • décloisonner les services, les groupes,
  • fluidifier la circulation de l’information,
  • favoriser (ou en tout cas, stimuler) la créativité,
  • impliquer davantage les collaborateurs.

Mais… encore faut-il que ce soit autre chose qu’un mot sur une présentation !

Transversalité ? Comment ça se passe pour les générations actuelles ?

Les générations Y (et surtout Z) ont grandi (et grandissent encore) dans un univers de réseaux, d’horizontalité et de partage.
Elles valorisent plutôt la coopération (bien plus que la hiérarchie) et la curiosité (plus que la spécialisation).

Pour elles, la transversalité n’est pas un outil de management, c’est une manière d’être au travail : « Je m’intéresse à ce que fait l’autre, je comprends mieux les enjeux du collectif, et j’accepte que la valeur naisse de la diversité.« 

Mais cet état d’esprit demande un environnement propice : un climat de confiance, une reconnaissance du droit à l’erreur et une organisation qui ne pénalise pas le fait de “sortir de son périmètre”.
(pour aller plus loin : retrouvez l’article LeLab BPI France « Travail et jeunesse : démêler le vrai du faux sur les attentes d’une génération en quête de sens »)

L’overdose de transversalité : entre discours et réalité

Ce concept est devenu omniprésent. Chaque jour, un nouvel article sur Linkedin, dans Google Actus ou dans la presse promet de « réinventer la transversalité » ou de « décloisonner les services ».

Le problème ? Beaucoup d’entreprises se contentent d’en parler sans revoir leurs pratiques réelles.
On crée des « groupes transverses »… mais on garde les mêmes circuits de validation, les mêmes silos de pouvoir, les mêmes outils qui ne communiquent pas.

La transversalité devient alors (plutôt) un slogan managérial !

La transversalité ne s’impose pas, elle se choisit

Travailler en transversal, ce n’est pas une obligation de plus dans un plan d’action RH.
C’est une volonté personnelle de sortir de sa zone de confort, de s’intéresser à d’autres métiers, de comprendre des logiques différentes.

Et idéalement partagée à plusieurs : quand la volonté personnelle devient une volonté de groupe.

Elle suppose :

  • de la curiosité,
  • de la bienveillance (en acceptant notamment qu’on ne sait pas tout… plutôt dur pour un bon « martien », qui plus est, doit toujours trouver des solutions à tout ! ),
  • et surtout du temps (ce que les organisations n’accordent pas toujours, d’autant plus avec le contexte actuel).

Sans ces ingrédients, la transversalité reste un vernis (ou une simple « bonne volonté » qui reste dans un carton à l’entrée).

Ce qui bloque (vraiment) la transversalité

Le vrai frein n’est pas technologique ou structurel. C’est humain.

C’est la peur :

  • peur de perdre du pouvoir,
  • peur d’être jugé en dehors de son expertise,
  • peur que « l’autre » prenne ma place.

Tant qu’on ne travaille pas sur ces peurs là (sécurité psychologique, reconnaissance et confiance) aucune transversalité durable n’émergera. (quelques références intéressantes à lire sur la peur : article de Inspiration Management, un article de Welcome to the Jungle aussi aborde la peur d’être jugé au travail)

En fait, si le (bon) mot-clef n’était pas « transversalité », mais « curiosité » ?

La curiosité est le socle de tout travail transversal.
Elle pousse à explorer, à comprendre, à écouter. Une entreprise (ou tout autre établissement) qui cultive la curiosité crée naturellement de la transversalité, sans avoir besoin de l’imposer.

En somme : la transversalité est un effet, pas un objectif.

Enfin, si on peut retenir quelques éléments : la transversalité n’est pas une nouvelle méthode de management, c’est une culture de relation, un état d’esprit, presque une posture.

Elle commence quand quelqu’un dit : « Je ne sais pas, explique moi ton job, ce que tu fais. »
Et c’est sans doute là que se trouve la plus belle preuve d’un effet de transversalité.

Kevin - co-fondateur